Le Chef Roger – elle ignorait son véritable nom – avait une carrière admirable derrière lui, faite de récompenses et de brevets culinaires. Personne n'aurait cru qu'il se retirerait à New York, où il n'avait aucune attache ; la plupart des gens s'était imaginé qu'il resterait à Paris, comme à ses débuts. Seulement, il n'était pas prêt à prendre sa retraite comme les autres l'entendaient : il voulait continuer à travailler pour des particuliers, ce qui ne lui était pas permis à Paris. Les Hautes Sphères françaises avaient déjà leurs chefs attitrés et il ne se sentait pas la force de se faire une place parmi eux. Il avait donc décidé d'immigrer et de retourner dans une ville qu'il avait particulièrement aimé. New York était l'occasion d'être employé par un riche héritier et de finir un parcours parfait tout en douceur. Lorsqu'il avait entendu que la descendante de la famille Payne s'y rendait également, il avait sauté sur l'occasion.

« Voyez-vous, lui avait-il dit, les croissants qu'ils servent sont détestables. Et je sais que vous êtes fine gastronome, n'est-ce pas ? Plutôt que de vous tracasser pour trouver un cuisinier sur place, vous pourriez peut-être m'engager. »

Elle avait accepté, bien entendu. Connaissant sa réputation, elle n'avait pas douté une seconde de son aptitude à répondre à ses demandes, aussi étranges fussent-elles. La première fois qu'elle lui avait demandé un steak cru, les yeux lui étaient quasiment sortis de la tête. Il avait été si surpris qu'il s'était permis quelques remarques, auxquelles elle avait répondu patiemment. Puis il l'avait contemplée manger sa viande en silence. Une fille si raffinée n'était pas du genre à avoir du sang dégoulinant sur le menton ; et pourtant, Aurora aimait sentir la chair dans sa bouche et le liquide rougeâtre couler dans sa gorge. Elle ne se permettait ces mets qu'en intimité, lorsqu'elle était avec ses familiers et son personnel uniquement : même lors de réceptions entre Sangs Bleu, elle se comportait avec beaucoup de distinction.

Au bout d'une très courte semaine, le Chef Roger connaissait déjà ses habitudes. Le matin, elle prenait un thé sucré avec une pâtisserie et un fruit. Le midi, une légère salade. Et le soir, une soupe. C'était d'une facilité presque enfantine pour cet homme, qui avait souvent cuisiné pour plus de deux cents personnes à la fois. Toutefois, lorsque le vendredi vint, Aurora demanda à Roger de ne pas cuisiner pour elle. Étonné, il crut d'abord qu'elle le renvoyait, mais la raison était toute autre. Elle lui expliqua brièvement qu'elle avait un rendez-vous important et s'éclipsa dans sa chambre pour n'en sortir que deux heures plus tard. Elle avait troqué la combinaison qu'elle portait lorsque son métier exigeait qu'elle fasse de la peinture contre une robe noire très élégante et avait, contrairement à son habitude, laissé ses cheveux blonds détachés. Un sourire aux lèvres, elle se dirigea vers la porte, plus belle et plus attirante que jamais. Le Chef Roger ne doutait point que sa petite protégée avait rendez-vous avec un bel homme, qui devait sûrement l'attendre patiemment dans un restaurant huppé. Avant qu'elle n'ait eu le temps de partir, il lui enleva son châle pailleté. « Ce jeune homme sera sûrement ravi de vous prêter sa veste si vous avez froid ! » confia-t-il en riant, fier de son astuce vieille comme le monde. Il ne se rendait certainement pas compte que ce n'était pas une soirée comme les autres et qu'elle ne rejoignait pas n'importe quel homme : elle devait retrouver son Lien. La peur mêlée à l'excitation la paralysèrent un instant. Mais, se ressaisissant, elle enfila de magnifiques escarpins et sortit, sous le regard attendri de son personnel et douloureux de ses familiers.

La voiture ne mit pas longtemps avant de se garer devant le restaurant, laissant peu de temps à Aurora pour rajuster son maquillage. Lorsqu'elle fut sûre d'être prête, elle descendit de la voiture et pénétra dans l'établissement, devant les yeux ébahis du portier. Elle avait quelque chose d'enfantin dans le visage et une fraîcheur qui lui était propre, elle espérait que son Lien s'en souviendrait. Mais rien n'était moins sûr : elle-même n'avait aucun souvenir de lui...

Alors qu'elle progressait dans la grande salle, sous les lumières tamisées des lustres, son regard fut attiré par un homme. Il était assis seul. Était-ce lui ? Malgré un doute persistant, quelque chose s'était réveillé chez Aurora : quelque chose dont elle avait ignoré l'existence à ce jour. Son cœur s'emballa et son souffle fut de plus en plus irrégulier ; ce bel homme, au visage angélique – c'était le cas de le dire – et aux yeux dont la profondeur créait un dangereux vertige, faisait un étrange effet à la jeune Sang Bleu. Son corps, que l'on aurait dit fragile comme celui d'une poupée, fut guidé instinctivement vers lui. Était-ce l'un des aspects du lien éternel ? Ses yeux cherchèrent ceux du jeune homme et, pour la première fois depuis son arrivée, elle se sentit désarçonnée. Elle qui aimait tout contrôler, elle avait l'impression de ne pas se maîtriser. Il devait sûrement sentir l'affolement qu'il entraînait chez elle ; elle espérait simplement qu'il ne la prenait pas pour la pire des gourdes. Le désir aveugle de retrouver son Lien y était sûrement pour quelque chose, mais il semblait à Aurora que sa propre réaction était exagérée. Elle lutta contre cette agitation pour recouvrer son calme habituel et s'approcha avec douceur.

« Est-ce que nous nous connaissons ? » demanda-t-elle alors en tentant de dominer du mieux possible le ton de sa voix.

À l'instar d'une majorité de familles sang-bleue, la maison Rowling était régie par une armée d'agents de service qui circulait dans les appartements à longueur de journée afin d'accéder aux besoins de leurs employeurs. Rosa Zanetti était l'une des plus anciennes employées de cette maison et, elle en était particulièrement fière. Étant arrivée à New-York avec ses enfants une vingtaine d'années plus tôt, elle était parvenue à décrocher cet emploi qui l'avait certainement sauvée de la misère. La vieille femme, après avoir déposé le combiné sur son socle, s'empressa de rejoindre la chambre du concerné. Elle frappa deux fois contre le panneau de la porte et, entrebâilla cette dernière. Bien entendu, Logan l'avait repéré dès qu'elle avait posé un pied sur cette marche branlante du rez-de-chaussé. Simulant parfaitement la surprise, il releva les yeux du livre qu'il était "en train de parcourir" et offrit un large sourire bienveillant à celle qui avait durant de longues années, été sa nourrice. « Logan, votre père vous fait savoir qu'il compte diner avec vous ce soir, en ville » l'informa t'elle, une mine pensive sur le visage, comme si elle craignait d'avoir oublié une information capitale. « Merci beaucoup Rosa. Comme nous serons tout deux absents ce soir, je vous suggère d'en profiter pour passer la soirée avec votre petit-fils. Je suis certain qu'il en sera très enthousiaste. Je n'aurai certainement pas besoin de vous aujourd'hui et, après tout, je ne suis plus un petit garçon. ». Ils échangèrent un regard éloquent, saturé d'affection, puis la vieille femme décréta qu'il était temps de s'effacer et, referma délicatement le battant de la porte afin de le laisser vaquer à ses occupations. Bien entendu Rosa, tout comme l'ensemble de ses collègues, ignorait en tout point la nature vampirique de leurs employeurs. Ils avaient été très rapidement confrontés aux inhabituelles, habitudes alimentaires de la famille, mais par bonheur, aucun n'avait été assez audacieux pour poser des questions embarrassantes. Parfois, il arrivait à Logan de se demander si, sa relation avec la nourrice serait la même, si elle savait. Et souvent, il chassait ce genre de réflexions inutiles.

Logan rangea quelques affaires qui traînaient sur son lit, tout en laissant ses pensées naviguer à leur guise. Ainsi, son père dans ce cycle, était de retour à la Grosse Pomme ? C'était une information qu'il ne s'attendait certainement pas à recevoir. Aux dernières nouvelles, Richard Rowling était occupé à conclure quelques contrats immobiliers en Californie. Logan rangea les quelques affaires qui étaient étalées sur son lit, tout en laissant le fil de ses pensées naviguer à sa guise. Ainsi, son père dans ce cycle, était de retour au sein de la Grosse Pomme ? C'était une information plus ou moins inattendue. Aux dernières nouvelles - qui ne dataient que de la semaine précédente - Richard Rowling dirigeait la nouvelle campagne marketing de son entreprise immobilière et, finissait de conclure ses nouveaux contrats avec de riches acheteurs, intéressés par les terrains d'Orange Country. Le jeune homme sentit une pointe de curiosité naître en lui. Qu'est-ce qui avait bien pu amener son père, à rentrer si rapidement ? Certainement qu'il lui expliquerait le pourquoi, le soir même, au cours de ce dîner. Un sourire étira les lèvres du sang-bleu. Déterminé à tirer les vers du nez de son paternel, il fit machinalement craquer les articulations de ses doigts, avant de se plonger dans son armoire.

Lorsque le véhicule s'arrêta en douceur à destination, le jeune homme glissa un billet au conducteur, accompagné d'un généreux pourboire, avant de quitter l'habitacle de son taxi avec une souplesse féline. Une légère brise vînt se perdre dans ses boucles brunes, tandis qu'il claquait proprement la porte derrière lui. Il sonda minutieusement la rue, à la recherche de Richard, tentant de le repérer dans cette masse dense, en mouvement. Ce qui, même en possession de ses capacités, se révéla impossible. Il se résolu à patienter quelques instants. Le jeune blue blood était vêtu d'un simple costume trois pièces aux tons gris clairs, particulièrement élégant. Dans le genre d'établissement où son père l'invitait, il était généralement déplacé de se présenter dans des tenues décontractées. Il n'était d'ailleurs pas rare de voir quelques badauds se faire recaler à l'entrée du restaurant, pour ces raisons de présentations. L'entreprise, disaient-ils, avait une image à conserver. Décrétant qu'il serait d'autant plus intelligent d'attendre son père à l'intérieur, Logan pénétra à l'intérieur du restaurant uppé et, se laissa conduire à une table réservée. Il refusa poliment l'apéritif que lui proposait l'hôtesse, préférant attendre son compagnon de table.

Quelques cent vingts minutes plus tard, le jeune Rowling était toujours assis, seul. Plusieurs fois, l'hôtesse était revenue vers lui, lui proposant des rafraîchissements qu'il avait finalement accepté, afin de passer le temps. Il n'avait pas mis longtemps à tomber sur le numéro de la jeune femme, rédigé à l'arrière d'une serviette de table qu'il avait ensuite fait mine de ne pas remarquer. Inconsciemment, ses doigts commencèrent à donner un concert rythmé de clapotements, à peine sonores. Finalement, son attention fut attirée par la discrète sonnerie de son téléphone portable, en provenance de sa poche intérieure droite. Lorsque ses yeux parcourent l'écran, un éclair de déception zébra le visage du blue blood. Visiblement, Richard serait retenu ce soir et, ne pourrait pas être présent. Il proposait donc de remettre leur "entrevue" à un autre jour cette semaine.

Les sourcils du jeune vampire se froncèrent soudainement, tandis qu'une mine intense s'installait sur ses traits. Il était presque certain de n'avoir jamais rencontré cette jeune femme auparavant. Néanmoins, sa simple apparition réveillait en lui un étrange sentiment de ... familiarité. Ses prunelles océaniques suivirent la progression de l'inconnue à travers la pièce, qui lui sembla vaguement insonore. Lorsqu'elle tourna la tête vers lui, il cru percevoir quelques lueurs d'espérances dans ses iris, juste avant de se sentir transpercer. Comme si elle avait d'abord cherché à voir en lui, plutôt qu'à le voir, lui. Le jeune homme se surprit à sentir son rythme cardiaque s'accélérer et, il dû s'accorder une profonde inspiration afin de subvenir aux besoins de son corps déstabiliser. L'étrange jeune femme dansa entre les tables afin de se frayer un chemin jusqu'à lui et s'arrêta à quelques pas, conservant une réserve. Lui-même se leva, afin de ne pas paraître mal élevé et patienta. Il perdit quelques instants, avant d'assimiler le sens de la question de la demoiselle. Ainsi, son impression était réciproque, ça avait quelque chose de rassurant. « Je ne pense pas, mais vous me semblez étrangement familière » répondit-il d'une voix lente. Ses orbes bleues se détournèrent du visage de la jeune femme et, glissèrent le long de ses bras nus, afin de découvrir - ou non - la couleur veineuse typique, des sang-bleu. Un sourire franc s'épanouit sur ses lèvres, lorsqu'il eut cette confirmation. Un "et si ..." lui traversa l'esprit, qu'il s'empressa d'enterrer, préférant ne pas sauter sur les conclusions trop rapidement. « Je m'appelle Logan Rowling. J'habite à New-York. » se présenta t'il, en lui tendant traditionnellement une main. « Puis-je vous invitez à vous joindre à moi ? » proposa t'il, en tirant la chaise qui jusqu'alors lui avait fait face.

La confusion qu'Aurora avait ressenti était démesurée, elle en était consciente. Il y avait cependant quelque chose qui lui échappait ; quelque chose qui la terrifiait, en même temps. Elle attendit une quelconque réaction de la part de son interlocuteur, qui sembla lui aussi troublé. Avait-il fini par la reconnaître ? L'attention du jeune homme se porta automatiquement sur les bras d'Aurora, dont les veines bleutées manifestes ne pouvait que signifier son appartenance à la communauté Sang-Bleu. Après un instant, il avoua ne pas la connaître et la jugea malgré tout assez digne de confiance pour se présenter. Lorsqu'il prononça son nom, la jeune femme le répéta plusieurs fois dans sa tête pour le mémoriser et attrapa sa main, qu'elle serra avec courtoisie. « Enchantée, Logan. », répondit-elle, un peu gauche. Son assurance habituelle semblait se consumer et disparaître comme la banane flambée qui traversait la salle, à tel point qu'elle resta muette lorsqu'il lui demanda si elle voulait se joindre à lui. Le silence ne fut pas assez long pour qu'il suppose un refus, mais il dura suffisamment pour qu'il puisse remarquer son désarroi. Quelques secondes furent nécessaires pour qu'elle se rappelle enfin qu'elle avait rendez-vous, et qu'elle s'était dirigée vers cet homme sans même savoir si c'était bien lui qu'elle devait rejoindre. Et, visiblement, ce ne devait pas être le cas. La panique la gagna peu à peu mais elle trouva enfin la lucidité d'accepter la demande de Logan. « Avec plaisir. En fait, j'avais rendez-vous avec un ami mais je crois qu'il ne viendra pas... » avoua-t-elle avec un léger regret. Ses yeux balayèrent discrètement la salle pour être vraiment sûre qu'aucun autre homme ne l'attendait à une table. Et en effet, personne ne correspondait : il n'y avait que des couples et des familles qui ne lui évoquait rien. Son esprit s'emplit alors de soulagement ; elle pouvait s'asseoir à la table du jeune homme sans se sentir coupable. Pour être honnête, ça l'arrangeait. Elle ne s'imaginait pas repartir maintenant, après avoir été déconcertée face à cet étrange inconnu, vers qui elle avait été tout de suite guidée. Non, elle n'avait pas été amenée à ce type par hasard... Un besoin insatiable de connaître sa véritable identité la démangeait ; et si c'était finalement lui ? Certes, il n'était pas l'homme que son intermédiaire avait contacté ; mais si c'était une erreur et que son véritable lien était devant elle ce soir ?

Aurora tira finalement la chaise libre et s'assit aux côtés de Logan, oubliant de nouveau le monde qui l'entourait. L'impression d'avoir déjà vécu cette scène très longtemps auparavant la submergea. C'était un peu comme si elle recommençait une vie passée dont elle avait été l'héroïne et dont Logan faisait partie, sauf que cette fois-ci, elle ne le connaissait pas. Les souvenirs de ses cycles précédents étaient relativement nombreux mais rien, dans les images qui lui revenaient, ne lui donnait la véritable identité du jeune homme. Un sentiment de frustration et de curiosité illumina le regard d'Aurora, qui remarqua alors qu'elle ne s'était pas présentée. Elle se sentit honteuse de sa propre impolitesse et quitta sa mémoire pour se consacrer à leur conversation. « Je m'appelle Aurora Payne, je suis londonienne. » informa-t-elle. Ce nom ne lui disait certainement rien, mais elle estima que c'était la moindre des choses de s'annoncer. Puis, elle enchaîna : « J'ai l'impression de vous connaître comme si nous étions des amis de longue date, c'est assez perturbant, je dois vous l'avouer. Est-ce que vous auriez la moindre idée des circonstances de notre rencontre ? ». Une chose était sûre, ils ne s'étaient jamais vus dans cette vie-là. Ils s'étaient donc forcément croisés par le passé. Encore fallait-il savoir quand et comment.

La serveuse choisit ce moment pour les aborder et tenta de les faire consommer, vantant les mérites des différents plats proposés au menu. Elle dévisagea Logan avec insistance – et fut déçue de constater que la serviette sur laquelle elle avait écrit son numéro était délaissée sur le bord de la table – pour enfin conseiller les mets les plus gras et les plus improbables à la belle vampire. Aurora n'y fit pas attention et céda pour un plat de pâtes avant de se tourner vers Logan avec malaise. Et s'il avait déjà dévoré une assiette avant qu'elle n'arrive ? Elle ne voulait pas être la seule à dîner et ne voulait pas non plus qu'il se sente obligé de manger avec elle. « A moins que vous n'ayez déjà mangé... ? ». Son ventre émit un petit bruit qui la fit rougir de la tête aux pieds, elle se sentait plus sotte que jamais. Néanmoins, le besoin l'emportait sur tout le reste : elle était affamée. La jeune Sang-Bleu ne doutait pas qu'après ça, son congénère se forcerait sûrement à mentir et à commander un plat ; et cette pensée la fit, évidemment, sentir encore plus ridicule. Mais on pouvait toujours supposer qu'il n'avait pas encore mangé...

Aurora cessa de se torturer l'esprit avec des choses aussi pitoyables et futiles pour en venir enfin aux faits. Les questions tourbillonnaient à mesure que le temps s'écoulait et le besoin de réponses se faisait aussi plus fort, plus intense. « Parles-moi de toi », pria-t-elle. Le tutoiement n'était pas une chose bénigne pour la jeune femme, cependant elle se sentait assez à l'aise pour qu'un simple pronom ne soit pas un dilemme. Malgré tout, son intonation avait gardé une certaine réserve, qui témoignait du fait qu'après tout, ils ne se connaissaient pas. Outre les costumes des années mille neuf cents – où elle n'était pas en cycle -, l'ange de la Renaissance avait imaginé son interlocuteur dans des tenues les plus variées ; pourtant rien n'y faisait, elle n'arrivait pas à savoir dans quel cadre ils s'étaient rencontrés. Cet homme était un véritable mystère, une énigme, qu'elle se faisait un point d'honneur à résoudre. Elle le fixa de nouveau et plongea encore une fois dans ses yeux, espérant y trouver les explications dont elle avait besoin et qui tardaient à arriver. La seule chose qu'elle décela fut simplement la beauté de ses iris, aussi clairs que le plus dégagé des ciels. Mais n'était-ce pas là la plus significative des réponses ?